Lundi 28 octobre dernier, nous étions à l’Automobile Club de France pour assister à la rencontre puis à la conférence de presse du président de l’OICA (Organisation Internationale des Constructeurs Automobiles) et du représentant spécial du Secrétaire général des Nations Unies pour la sécurité routière ou, pour faire simple, à l’entrevue qui réunissait Christian Peugeot et Jean Todt.
Lors de cette rencontre organisée dans le prestigieux cadre de l’ACF, le Président de l’OICA a présenté à Jean Todt, le dossier réalisé grâce à l’aide des constructeurs membres de l’OICA en matière d’exigences de sécurité à promouvoir auprès des autorités ou gouvernement de chaque pays.
Plus de sécurité pour moins de morts et de blessés
Le rapport présenté par l’OICA met d’abord l’accent sur les chiffres de la sécurité routière à l’échelle mondiale en 2018.
Avec plus de 1.3 million de morts, 50 millions de blessés, la situation est alarmante sur les routes de la planète.
Les pays à revenu faible ou intermédiaire comptent pour près de 93% dans le nombre des décès mais ils ne possèdent que 54% du parc mondial de véhicules.
Plus de la moitié des décès dus à la circulation routière touchent les utilisateurs les plus vulnérables que sont les piétons, les cyclistes et les motards.
Ainsi si on se fie aux données de l’OMS (Organisation Mondiale de la Santé) parues durant l’été 2017, l’insécurité routière dans le monde est carrément la principale cause de mortalité dans les pays à revenu faible. On découvre par exemple qu’elle représente la première cause de décès chez les jeunes de 5 à 29 ans. Par ailleurs, au delà du terrible « coût humain » elle coûte aussi cher à l’économie des pays puisqu’elle représente quelques 3% du PIB des pays chaque année, ce qui n’est pas anodin.
Les bons élèves mondiaux en matière de sécurité routière sont l’Angleterre, la Suède et le Danemark où l’on note à une très faible présence policière puisque les conducteurs « s’auto-policent » eux-mêmes de par leur éducation et formation.
Jean Todt a par exemple rappelé que la sécurité routière mondiale doit faire face à une véritable pandémie, comme peuvent l’être certaines maladies. Il a aussi redit à l’assemblée que l’éducation, dans la vie et sur la route, est primordiale, et que l’application des lois a permis dans bon nombre de pays de faire considérablement chuté le nombre de morts et de blessés sur la route.
On aura à l’esprit que la France est passée de 18.000 à 3.250 décès routiers en 45 ans avec un parc automobile qui a doublé par rapport à la période 1974/1976, années les plus terribles en matière d’accidentologie sur les routes.
La sécurité routière est l’affaire de tous… les états
L’OICA appelle les gouvernements à placer tous les acteurs du secteur automobile sur un pied d’égalité et devant leurs responsabilités et demande que soient imposées des exigences minimales obligatoires en matière de sécurité des véhicules pour tous les véhicules neufs vendus (auto, camion, cycle et motocycle) sur leur territoire.
L’organisation des constructeurs assure que l’expérience acquise sur les marchés développés a montré que la législation en matière de sécurité préserve, dans quasiment tous les pays, les principes de la libre concurrence libre tout en garantissant un minimum de sécurité à tous les usagers de la route.
L’OICA explique par ailleurs qu’elle est prête à mettre au service des états son expertise et s’engage à convaincre et aider les pays qui le veulent à mettre en œuvre dans leur législation, les exigences minimales pour une sécurité routière plus efficiente.
L’organisation des marques automobiles, prêchant aussi pour sa paroisse, met en garde sur le fait que se concentrer uniquement sur les spécifications des nouveaux véhicules n’est pas suffisant pour une meilleure sécurité.
Elle a donc aimablement rappelé la nécessité d’accélérer le renouvellement des parcs de véhicules, souvent très anciens et dangereux, notamment dans les pays dits « émergents » ou à faible revenu.
Par ailleurs, L’OICA assure que pour aller vers une amélioration de la sécurité routière, il est aussi important de ses pencher sur les conditions locales parfois très spécifiques, notamment en matière d’infrastructures routières (état des routes essentiellement), d’entretien du parc automobile, de formation des usagers de la route et de gestion du trafic routier, notamment en milieu urbain ou péri-urbain.
Les propos officiels
Dans l’ambiance presque feutrée d’une des salles de l’ACF, Christian Peugeot, le président de l’OICA a toutefois été toutefois assez ferme et de dire avec assurance : « Il est essentiel de tirer parti de l’expérience acquise dans les pays développés, où une telle approche intégrée associant tous les facteurs a permis d’obtenir des niveaux de sécurité routière sans précédent malgré une forte concentration de trafic.
Les constructeurs ont investi et œuvré depuis des décennies pour faire progresser la sécurité de leurs véhicules et les résultats sont probants. Ces progrès doivent servir le plus grand nombre pour le bien de tous ».
Bien sur on pourra voir derrière ce discours, une parole bien rôdée mais aussi une réalité. En effet nous ne devons pas oublier, notamment en Europe, au Japon, au USA ou en Corée du sud, les gros efforts faits par les constructeurs depuis une bonne quarantaine d’années en matière de sécurité active et passive présente sur nos autos mais aussi moto.
Jean Todt, patron de la FIA mais aussi représentant de l’ONU, a répondu à Christian Peugeot d’une manière très mesurée et quasi diplomatique (langue de bois ???) en disant : « Je me réjouis de constater que, pour la première fois, l’industrie automobile convient qu’un nombre minimum d’équipements de sécurité devrait être disponible dans tous les pays. Le manifeste de l’OICA constitue une avancée importante. J’exhorte les constructeurs à aller encore plus loin en anticipant autant que possible la mise en place de ces obligations législatives.
La Conférence internationale qui se tiendra à Stockholm en février 2020 leur offrira une excellente occasion de démontrer cet engagement. J’espère que ce rendez-vous marquera une étape décisive en faveur de la sécurité routière ».
Au chapitre des gens présents dans l’assistance, on a noté la présence d’Emmanuel Barbe, le délégué interministériel à la sécurité routière, qui fut plutôt discret durant la matinée mais aussi l’absence de madame Perrichon (LCVR) ce qui a épargné à tous ses propos vindicatifs et souvent hors contexte.
Ce n’est qu’un début
Les éléments officiels sont donc en place pour faire avancer les choses en matière de sécurité routière. On comptera aussi sur une vraie harmonisation des tests NCAP qui participent aux homologations des nouveaux véhicules mais qui, parfois, révèlent de belles disparités d’un continent à l’autre.
Durant la conférence, on a ainsi abordé un fait pas si anodin que ça et qui est une réalité sur les marchés. Celui d’une même voiture semblable en apparence vendue dans différents pays mais dont la structure est bien différente notamment en terme de sécurité active ou passive.
Les cas de l’absence d’ESP, d’ABS ou même de ceintures à l’arrière d’un véhicule sont une réalité tangible… Les constructeurs et leur représentant l’admettent mais restent plutôt évasifs sur le sujet même s’ils assurent qu’ils vont faire mieux et plus dans l’avenir.
On pensera aussi à une amélioration de l’état des réseaux routiers ou à l’entretien de l’existant pour éviter une détérioration qui participe souvent à une baisse du niveau de sécurité sur les routes.
La formation des conducteurs est aussi un vrai problème notamment dans les pays où l’illettrisme est important et la conduite sans permis une habitude…
On ajoutera une dose d’écologie et d’évolution vers un transport durable ou une mobilité écologiquement acceptable [ndla : le mot est à la mode et remplace souvent les termes d’automobile, de voiture…] et on pourra se dire que l’OICA, l’ONU mais aussi l’ACEA, la FIA ou même le CCFA en France, sans parler des états, ont du pain sur la planche pour les prochaines années s’ils veulent améliorer la sécurité routière et participer ou ne pas trop détruire nos écosystèmes.
Pour retrouver tous les détails du document et des actions proposées par l’OICA en matière de sécurité automobile, vous pouvez cliquer le lien suivant : Manifeste de l’OICA
Merci à l’ACF, au CCFA et à l’OICA pour l’invitation.
Pour compléter l’article, voici un lien avec un propos à prendre en compte
https://ffmc.asso.fr/la-politique-de-securite-routiere utm_source=dlvr.it&utm_medium=twitter&fbclid=IwAR2Xk8ixpCkRwMYPiu8Ocaek1H67a9FGMZbbJzYRgo_Zb5UMxjSAJ7LWZTA