Non, je ne vais pas vous parler du dernier blockbuster américain, mais bien du Mondial de l’Automobile de Paris 2022. Ce salon est bien un survivant européen car c’est le seul des salons automobiles qui n’ait pas été annulé cette année et probablement pour les prochaines années. De l’autre côté de l’Atlantique, seuls Détroit et Los Angeles ont tenu quand notre voisin suisse a annulé son réputé salon de Genève qui va prendre la direction du Qatar… un an après la Coupe du monde de football, c’est à dire novembre 2023. Le GIMS à Doha, ça risque de ne pas le faire et de ne pas attirer les visiteurs européens qui aimaient l’ambiance chaleureuse de Palexpo.
On ne sait pas ce qu’il va advenir de l’IAA munichois qui fut assez quelconque l’an passé et du traditionnel salon de Bruxelles qui ouvre normalement la saison.
Compte tenu du contexte économique post-covid, c’était un sacré pari de la part des organisateurs, de se lancer dans ce Mondial. La dernière édition de 2018 fut belle malgré six constructeurs absents. Cette année, il est plus facile de compter les présents que les absents tant il y en a (au moins 25 si on se fie aux listes publiées cet été), mais le salon est bien là et a ouvert ses portes à la presse le 14 octobre dernier. J’étais là !
On entendait déjà dire avant l’ouverture, ça sera « le salon de l’électricité chinoise », « ça ne fait pas rêver », mais qu’en est-il ?
Je ne vous cache pas qu’en passant les portes du parc des expositions de la porte de Versailles, lundi, je ne savais pas ce que j’allais trouver. Sans doute pas l’ambiance des grandes heures du salon de l’auto de mon enfance où tous agglutinés autour des stands de supercars ou des sportives, nous nous disions qu’un jour le rêve deviendrait réalité.
La vraie question est là ! Ce mondial va-t-il me ou nous faire rêver ?
Je me lance dans l’arène, qui curieusement n’arbore pas la moquette des grands jours. « C’est peut-être un détail pour vous, mais pour moi ça veut dire beaucoup » !
Soucis d’économie ? D’écologie ? De morosité ? Bref, le décor est planté, je ne suis pas là pour rêver. Mais ce salon est instructif et non dénué de surprises. Et justement, je ne vais pas vous faire le catalogue du salon mais me concentrer sur quelques coups de cœur !
Pas d’inventaire à la Prévert, juste des voitures qui se mettent au vert
A l’arrivée dans le premier hall, un stand magistralement nu et conceptuel ! Première surprise pour le stand d’Hopium, ce nouveau constructeur français, qui expose une belle auto tout en longueur couleur argent. C’est la présentation de la future voiture française « full hydrogen ». Plantée sur son plateau tournant, elle a de l’allure. On l’annonce comme le top de la technologie ! Et moyennant un premier versement de 656 €, vous pourrez précommander cette auto venue du futur ou plutôt qui vous y emmenera. Ici on parle d’Hopium pas de DeLorean !
La production débutera normalement dans le courant de l’année 2025 et il faudra alors débourser la somme de 120 000 € pour l’avoir dans son garage. A priori, le Crédit Agricole adore, il a signé un protocole d’accord pour 10.000 exemplaires dans quelques années alors on imagine que la banque sera là pour vous aider à la financer ou à la louer.
En face et un peu plus conventionnel, à la mode années 2000, nous trouvons Jeep, qui expose avec ses collègues de Stellantis, Peugeot et DS Automobiles .
Jeep présente son nouveau petit SUV, l’Avenger. Entre la Renegade et le Compass, il donne un coup de fraicheur à la marque, d’autant plus que c’est la première Jeep « Full électric ». Elle sera lancée au prix de 39 500 €. Elle a une bonne bouille, une belle technologie et on espère un bel agrément alors vivement l’essai !
Nous passons ensuite rapidement dans l’Empire du Milieu, BYD, ne prononcez pas BIDE, mais « Bi Why Di » ou Build Your Dreams, ça fait plus chicou plus sérieux.
Pas vraiment de coup de cœur sur ce grand stand, mais on doit dire que ces chinoises ont de la gueule et à l’intérieur elles semblent bien finies. Elles ont cependant un air de déjà vu, s’inspirant sans doute des réussites mondiales du moment. Je me suis installé dans la belle BYD HAN, qui me fait penser à une 508 phase 2. J’ai pris quelques instants pour monter à bord d’un bel exemplaire habillé d’un beau rouge avec un intérieur caramel tout en cuir et au top de la technologie du moment. Désormais, on ne peut plus dire que les Chinois ne savent pas faire de belles voitures, qu’elles soient électriques ou thermiques.
Changement de continent, je pars en Italie. Non, ne rêvez pas ! Pas de Ferrari neuves, pas de Maserati et pas de Fiat ou de Lancia et encore moins de Maserati !
Juste pour une première découverte des autos et surtout des nouvelles marques de la DR Motor Company qui assemble et vend en Europe des voitures du groupe chinois Chery. Si toutes les nouvelles autos de la firme chinoise et de son partenaire italien ne sont pas là, on sait nous parler de DR, de Sportequipe, de Ickx (oui comme le réputé pilote belge) et d’une marque dédiée aux petits véhicules électriques.
On notera toutefois que le SUV Sportequipe 8 est un véhicule Hybrid Plug-in ou PHEV qui revendique une autonomie de 1500 km grâce à un système d’alimentation trimodal (électrique, essence, GPL). A voir dans la réalité dans quelques mois lorsqu’il sera l’heure des essais.
Au salon le constructeur XEV est présent avec sa YOYO. C’est une petite voiture électrique du gabarit de la Smart Fortwo. Un look improbable mais 150 km d’autonomie, avec une vitesse de 80 KM/h, de quoi en faire une reine de la ville. On est ici dans la démarche d’une Renault Twizy, d’une Microlino ou d’une future Mobilize Duo.
Avec un tarif annoncé autour de 15 000 €, cela semble être une bonne solution pour répondre aux besoins du quotidien mais c’est hélas aussi cher que les véhicules européens équivalents. L’avantage prix du « Made in China » serait il en train de devenir une histoire du passé, c’est de l’ordre du possible.
Peut-être n’avons-nous pas besoin d’avoir une voiture de deux tonnes pour transporter nos 80 kilos, quelques courses ou un enfant… Les petits plus de la YOYO sont à chercher du coté des batteries qui sont interchangeables et d’une improbable annonce de l’arrivée de la conduite autonome dans le courant de l’an prochain.
Renault Group sort presque le grand jeu et c’est heureux !
Revenons en France et cette fois, dans le groupe Renault, qui occupe un autre Hall.
3 stands, 3 ambiances !
Pour Alpine, le truc à voir est le Concept car ALPENGLOW. La voiture est majestueuse, complexe, fluide, élégante, fuselée… enfin bref elle a un style hors du commun.
Lorsqu’on observe la voiture de près, on constate que les designers ont pensé aérodynamique, fluidité et performance. D’ailleurs, j’ai eu la chance de rencontrer la jeune équipe qui a travaillé sur le projet. J’ai pu discuter avec Marc Poulain et Patrice Mignot. Marc est « Chief Designer Advance », et vient tout droit de chez Ferrari ; Patrice est quant à lui Senior Designer. Tous deux ont travaillé avec enthousiasme sur ce projet en un temps très court, aux alentours de six mois. Ils me disent s’être inspirés de l’ADN d’Alpine. Les développements sur cette auto seront surement utilisés en série sur les prochains modèles.
Cette voiture est pensée pour un moteur hydrogène. Le design en a tenu compte dans les prises d’air de l’auto. Marc me précise bien que ça sera un moteur thermique à Hydrogène et que nous aurons donc le plaisir du beau bruit de l’engin. J’espère voir et entendre cette monoplace rouler un jour !
Moins spectaculaire, mais tout autant intéressant, deux A110 sur le stand, la radicale R, la super sportive de la gamme et l’A110 Eternité, l’A110 en version électrique qui n’a hélas pas vraiment convaincu il y a quelques mois lors de sa présentation.
Chez Dacia, les modèles présentés affichent leur belle nouvelle calandre avec le nouveau logo de la marque. Il n’y a pas à dire, Dacia est dans le coup. Les voitures ont un style, le Duster et le nouveau crossover Jogger ne sont pas à la peine sur le marché et l’on s’imagine bien au volant d’un tel véhicule. Quant à la Spring, sa bonne bouille et son faible encombrement font d’elle un choix judicieux parmi l’offre des voitures électriques pour nos centres villes saturés mais il faudra savoir en rester là car les performances globales restent bien trop justes pour envisager le voyage dans le sud ou vers la montagne.
Plus loin, un concept car, le Manifesto Concept. Ce buggy improbable en alu brossé veut donner un esprit baroudeur et minimaliste à la marque. Comme disait l’autre, on aime ou on n’aime pas, mais on ne reste pas indifférent !
Sur le stand Renault, je suis tombé une deuxième fois amoureux de la R5. La première fois, c’était la R5 familiale quand j’étais petit… Cette nouvelle Renault 5 électrique devrait être commercialisée en fin 2023 pour un prix inférieur à 30 000 € en entrée de gamme. Dans le design, c’est une vraie continuité avec la R5… à moins que ça ne soit avec la Supercinq. Une chose est acquise le style ne rend pas cette nouvelle auto déjà ringarde et le succès promet d’être au rendez vous si Renault sait y faire en matière de communication et de capcacité des batteries. Attention, succès commercial en vue !
Présente aussi, le proto de la future 4L. Pour le coup, c’est le futur, mais on ne voit pas bien le lien avec le passé, c’est massif, haut sur pattes. A tout dire, même après avoir fait plusieurs fois le tour, on cherche le lien avec la R4. Seuls, et encore la calandre et les phares ainsi que la vitre de custode trapézoïdale peuvent vaguement rappeler le populaire modèle originel. Mais c’est un concept car et Renault saura assurément revenir pour la version de série aux fondamentaux qui ont fait la réussite de notre bonne vieille 4L.
Pour revenir à notre réalité, le constructeur présente l’Austral. Un SUV full hybride assez conventionnel, mais qui dénote par sa volonté de qualité et de technologie. Si l’extérieur ne fait pas d’étincelles, l’intérieur est plus original pour la marque : écran surdimensionné, afficheur de vitesse moderne mais aussi présentation haut de gamme, qui font que l’on se sent bien dans cet Austral 2022-2023. La version « Esprit Alpine » en full hybride est annoncée à 44 500 €, ce qui ne semble pas délirant en rapport à ce que propose l’auto et même légèrement moins cher qu’un Peugeot 3008 équivalent.
Pour conclure, restons chez Renault sans être chez Renault, et allons à la rencontre de la jeune équipe de Lormauto. Cette entreprise de Lisieux a pour philosophie de se dire que finalement, ce n’est pas une fatalité de jeter sa voiture à 150 000 km et qu’il est possible de moderniser et fiabiliser le parc existant.
C’est ce qu’ils font avec la Twingo 1. Lormauto les récupère à la casse, et par la magie du rétrofit les transforme en électrique. L’entreprise modernise aussi l’intérieur pour le mettre aux normes de sécurité actuelles. Vous me direz, c’est du déjà vu ! Oui mais là où c’est astucieux, c’est que la voiture, ils ne vous la vendent pas. Ils vous la louent pour 100 € par mois, grâce aux aides d’Etat. Et quand la voiture est de nouveau « usée » ou fatiguée, ils recommencent l’opération ! C’est astucieux et pour le coup, très écolo. Toutefois il n’est pas sûr que cette idée plaise à tout le monde.
Mais comme le disait Sacha Guitry, « plaire à tout le monde serait plaire à n’importe qui ». Cette citation pourrait aussi s’appliquer à cette édition du Mondial qui, malgré le « qu’en dira-t-on », apparait comme une réussite en termes de visites et cela devrait, comme dit précédemment, permettre de faire perdurer la grande histoire du salon de l’automobile à la française, qui pour mémoire, existe depuis 1898. Rendez-vous est pris dans deux ans puisque le Mondial de l’Auto 2024 est d’ores et déjà annoncé et confirmé par les organisateurs.
