Sport automobile

Les cinq championnats du monde de la FIA (part 2)

Le WEC en fin de cycle

Depuis une guerre pas toujours larvée avec Bernie Ecclestone, alors maître incontesté de la F1, l’Endurance restait comme la rivale la plus dynamique de la série reine du sport automobile régie par la FIA. Les moins jeunes se souviennent que le petit Anglais chafouin avait alors presque réussi à tuer Le Mans.
Il fallut alors un extraordinaire sursaut des collectivités mancelles, sarthoises et ligériennes pour sauver Le Mans. Les 24 Heures faisaient de l’ombre à la vitrine de la FIA et le « big petit boss » n’eut de cesse que de solder l’aura mondiale de cette course de légende, principal rendez vous de l’endurance mondiale.
Cahier des charges quasi insupportable pour les infrastructures et les organisations, il fallut que la Ville du Mans, le Conseil Général de la Sarthe et la Région Pays de la Loire mettent la main à la poche (enfin, les contribuables) pour que surgisse de terre un équipement incomparable à l’époque. L’ACO, alors présidé par Michel Cosson, un as de la négociation juridique, monta des dossiers bétonnés et peu attaquables.
Peugeot vint joindre ses forces et s’impliqua avec ses magnifiques 905. Le Mans fut sauvé mais le coup était passé bien près.
On connait la suite puisqu’aux années de disette succédèrent des années rutilantes avec le nec plus ultra du savoir faire des constructeurs automobiles.

Les 1000 Miles of Sebring 2019 en quelques photos

La fin d’une époque dorée

En fait, après un âge d’or qui aurait pu laisser croire que l’Endurance deviendrait la discipline reine du sport auto, la désaffection du groupe VAG a décapité les espérances de Pierre Fillon et des dirigeants de la série.
La longue domination d’Audi après un énorme travail de lobbying du Professeur Ullrich avait fait du Mans et de la discipline une zone sous influence teutonne. Les dirigeants de l’ACO semblaient en effet littéralement hypnotisés par la puissance d’Ingolstadt.
Le règlement était initié dans les bureaux du staff de Wolfgang avant d’être enregistré par les autorités sportives mancelles et internationales. On se souvient de la litanie des plaintes d’Henri Pescarolo qui eut l’immense courage de ne pas baisser les bras avant que la réalité budgétaire ne le rattrape.
Il fallut Peugeot puis Toyota pour contester la suprématie des modèles du groupe Volkswagen que ce soit Audi, Bentley ou Porsche. Après avoir fait le vide, traumatisé par le dieselgate, VAG se couvrit d’une carapace de culpabilité et abandonna Le Mans aux japonais désormais seuls à courir avec des LMP1 hybrides.
Toyota subsiste désormais pour cette dernière séquence de la réglementation LMP1 hybride mais reste bien seul face à des constructeurs plus artisans que « start up nation ». A Sebring, les 9 tours de différence entre les deux japonaises et les concurrentes avaient de quoi laisser présager d’une bien ennuyeuse fin de championnat 2018/2019 ou la fameuse Super Saison.
Malgré tout le respect que l’on peut porter à Pascal Vasselon et ses équipes, on sait bien que c’est dans l’adversité que se forgent les légendes. Le pensum risque d’être pénible aussi, désormais, c’est vers l’avenir qu’il faut scruter avec un règlement 2020 qui promet.
Les hypercars de  »production » peuvent délivrer un beau plateau à une condition et une seule : que les hommes de la compétition et du produit prennent le pas sur les petits dictateurs du marketing et de la com’ qui trustent désormais les hautes sphères des instances supérieures des constructeurs.
Une sorte de folie idéologique impose le tout électrique, les dégâts collatéraux des élucubrations voltaïques d’un Carlos Ghosn n’en finissent pas de tuer la réalité automobile. Vous l’avez compris, je ne suis pas fan de la Formule E, je ne peux oublier que c’est Briatore et ses lieutenants qui sont derrière tout ça et franchement, les courses sur les parkings de supermarchés ne sont pas ma tasse de thé.
Les jeunes décisionnaires des marque engagées en Formule E semblent plus hypnotisés par les watts, les néons et le buzz que par la compétition et le pilotage.
A moins que le modèle économique ne soit bien moins vertueux qu’on voudrait nous le vendre et que cela finisse par se savoir malgré l’énorme poids du greenwashing qui existe dans le monde automobile.
Pour l’instant les annonceurs se concentrent sur cette ‘’discipline’’ survendue à des télévisions trop heureuses, elles aussi, de se faire une virginité vertueuse qui aide par instant à faire oublier une qualité de programmation des plus médiocres dans le meilleur des cas.
Toujours est- il que les constructeurs ne vivent plus l’Endurance et Le Mans comme un passage obligé, il est temps pour l’ACO et à la discipline de trouver un nouveau souffle.

Le Mans ne meurt jamais

Reste aussi et surtout à faire revenir les spectateurs aux abords des circuits. L’endurance est populaire, j’ai connu 300.000 spectateurs sur ‘’mon’’ circuit manceau. Je ne suis pas persuadé de revoir un jour ou un week end de juin, une telle affluence. D’autant que la stratégie très élitiste des dirigeants de la série m’incite à penser que demain, il y aura plus de place pour la réception des VIP dans des structures surdimensionnées que pour un public « populaire » et diversifié socialement.

La légende du Mans s’est faite avec des enceintes populaires et des prix de places abordables. Cela, visiblement, n’intéresse plus les actuels responsables manceaux. Chaque année, au Mans, la surface pour le public diminue, envahie par des constructions de plus en plus pharaoniques là ou le spectacle est le plus intéressant. Des ‘’invités’’ viennent y siroter une coupe de champagne en ne s’intéressant plus vraiment à la course mais plutôt à leur image et leur business, bien souvent peu ou pas en lien avec l’automobile.
Moins de place pour le public, une politique d’accueil élitiste, un plateau convenu et famélique, une nouvelle réglementation qui se cherche, des annonceurs enfouis sous les ors du néo-marketing consumériste et vert, non franchement, l’Endurance ne va pas bien. Mais c’est sans doute la fin d’un cycle et tout le monde le sait, les légendes ne meurent jamais.

A suivre…

Crédits photos : Nicolas Seurot (Legend Drivers) pour The Automobilist, FIA-WEC.

Jean-Michel Le Roy

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